Page:Rodenbach - Bruges-la-Morte, Flammarion.djvu/27

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s’en était si bien accommodé depuis son arrivée à Bruges. Il n’avait pas eu d’autre servante et celle-ci lui était devenue nécessaire, malgré sa tyrannie innocente, ses manies de vieille fille et de dévote, sa volonté d’agir à sa guise, comme aujourd’hui encore où, à cause d’une fête anodine le lendemain, elle avait bouleversé les salons à son insu et en dépit de ses ordres formels.

Hugues attendit pour sortir qu’elle eût rangé les meubles, s’assura que tout ce qui lui était cher fût intact et remis en place. Puis tranquillisé, les persiennes et les portes closes, il se décida à son ordinaire promenade du crépuscule, bien qu’il ne cessât pas de pluviner, bruine fréquente des fins d’automne, petite pluie verticale qui larmoie, tisse de l’eau, faufile l’air, hérisse d’aiguilles les canaux planes, capture et transit l’âme comme un oiseau dans un filet mouillé, aux mailles interminables !