Page:Rodenbach - L’Élite, 1899.djvu/246

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M. Besnard en a souvent fixé la silhouette énorme et pourtant harmonieuse : ainsi, dans ses panneaux de l’École de pharmacie où il créa ces paysages préhistoriques d’une puissante vision ; on y voit des éléphants — masse rocheuse, montagne qui se dandine — sur des couchants d’un mauve suave. Ailleurs, dans une aquarelle, des éléphants enlèvent des femmes nues dans leur trompe, ce qui est une imagination bien étrange et bien troublante — et les balancent en ce hamac de chair rugueuse, parmi des arbres voluptueux.

Mais c’est encore le cheval que M. Besnard préfère, pour ses lignes frémissantes, sa robe qui est une palette. Il aime faire des portraits équestres. Souvent il peignit des chevaux, sauvages et en pleine nature, ou se cabrant devant la mer, ou bien encore légendaires, d’allure apocalyptique, dans des sites de rêve.

Mieux que les animaux, les femmes seront un admirable motif décoratif pour l’artiste, qui ramène ainsi toutes les formes à une signification synthétique de lignes et toutes les couleurs à des accidents du grand Prisme qui sans cesse se déforme et se réforme.

Logiquement donc, M. Besnard devait être un peintre de la femme. Ici encore s’accuse son sens du moderne. Il l’arme d’une parure qu’on sent terrible ! Et toute la stratégie des volants,