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PREMIER AMOUR


Et pour ses chemins d’ici-bas
Un désir raffiné m’obsède
De pouvoir mettre sous ses pas
Une neige qui serait tiède.

À l’heure exquise des aveux
Et des lèvres appesanties,
Je veux pour la charmer, je veux
Des mots blancs comme des hosties.

Je veux des mots musiciens,
Pareils à ces versets mystiques
Que dans les tableaux anciens
Peignaient les vieux peintre gothiques ;

Ave pieux, textes divins,
Dont ils déroulaient les paroles
Hors des lèvres des séraphins
En ondulantes banderoles.

Des banderoles où leur voix
Traduit le chaste élan des âmes
Et murmure à la Vierge : Sois
Bénie entre toutes les femmes !