Page:Rodenbach - Le Miroir du ciel natal, 1898.djvu/211

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Une rivière grave et dont la largeur s’use
À rafraîchir les nefs, à jaillir dans la tour ;
Le chant, par instants, tombe avec un bruit d’écluse,
Les roseaux des tuyaux sont alignés autour.

Une rivière en qui les voix des soprani
Viennent perdre, un à un, leurs affluents débiles ;
Un silence, parfois, l’interrompt comme une île ;
Puis l’orgue recommence à couler, tout uni.

Splendeur de l’orgue : ombre et soleil, force et douceur ;
Mais la douceur d’une force de la Nature,
Un chant se profilant comme une architecture,
Comme un rocher, qui se couronne avec des fleurs.

L’orgue ! voix d’infini, voix de ciel, voix lunaires ;
Qui donc suppose encore un réel instrument ?
L’orgue est un puits sculpté où chante le tonnerre ;
L’orgue est le bruit apprivoisé d’un élément.