Page:Rodenbach - Les Tristesses, 1879.djvu/40

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Et moi je lui faisais à mon tour la promesse
Que, l’aimant d’amour pur, je ne l’oublierais pas ;
Puis, pour mieux lui parler, ralentissant mon pas
Et lui montrant du doigt la lune dans les branches :
« Plus tard, — dis-je, — quand vous verrez ces clartés blanches
« Songez : il m’aime encore et la regarde aussi !…

Et voyant s’abaisser son grand œil adouci
Je lui causais tout bas d’un frais petit ménage
En ville, et d’un chalet qu’on loue au voisinage ;
Du café qu’on prendrait au jardin, sur un banc
Devant le gazon vert et tiède, au soir tombant ;
Du gai retour, avec de gros bouquets de roses,
Et des printemps vermeils et des hivers moroses
Où, le soir, je lirais quelque livre badin
Tandis qu’elle, berçant notre dernier blondin,
Dont les cheveux frisés trembleraient à son souffle,
Chaufferait près du feu sa mignonne pantoufle !…