Page:Rodenbach - Les Tristesses, 1879.djvu/45

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Par un vague respect des usages anciens
Appuient sur leurs manchons de petits Paroissiens
Qu’elles lisent tous bas à travers leurs voilettes.

Les haillons sont ainsi près des riches toilettes,
Comme un symbole grave à la fois et charmant
Du destin qui nous fait petits également
Sous la voûte profonde et vaste de l’église
Où Dieu nous entend tous et tous nous égalise !…

Seul, je me cache à l’ombre obscure d’un pilier
Et la main sur les yeux je tâche d’oublier
Le monde dont le bruit grouille au loin dans la rue.
Je songe, et je reprends la route parcourue
Depuis ma sainte enfance et mes jeux primitifs.
Il fait bon : l’orgue chante avec des sons plaintifs
Que rythment sourdement quelques voix enfantines ;
L’autel tressaille au bruit des cloches argentines ;
L’encens remplit le chœur de ses subtils parfums,
Et le long des parois les évêques défunts
Auxquels le marbre donne une ferme attitude
Peuplent de spectres blancs la noire solitude.

Je rêve au temps lointain quand, simple et doux d’esprit,
Ma mère, en me couchant sur ses genoux, m’apprit