Page:Rodenbach - Les Tristesses, 1879.djvu/85

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Ils sont blonds comme une moisson,
Étant une moisson eux-même ;
Et gardent le chaste frisson
De la main de Dieu qui les sème.

D’où viennent-ils ? C’est un secret ;
Mais ils ressemblent à des anges ;
Et si l’on osait, on irait
Chercher des ailes sous leurs langes.

Dans leurs berceaux qu’ils sont jolis
Sous les petits rideaux de gaze ;
Leur grosse tête fait des plis
A la chair du bras qu’elle écrase.

Ils dorment, lassés de leurs jeux,
La bouche ouverte, avec paresse ;
Un pied blanc, hors des draps neigeux,
Semble chercher une caresse.

Un peu plus grands, sur les tapis
Ils gambadent à quatre pattes
Jusqu’à ce qu’ils soient assoupis
Et s’y couchent comme des chattes.