Page:Rodin - L’Art, 1911, éd. Gsell.djvu/131

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Comme j’en regardais plusieurs sous les yeux mêmes de Rodin, je lui dis combien elles différaient des dessins fignolés qui d’habitude recueillent les suffrages du public.


— Il est vrai, me répondit-il, que ce qui plaît surtout aux ignorants c’est l’inexpressive minutie de l’exécution et la fausse noblesse des gestes. Le vulgaire ne comprend rien à un résumé hardi qui passe rapidement sur les détails inutiles pour ne s’attacher qu’à la vérité de l’ensemble. Il ne comprend rien non plus à l’observation sincère qui dédaigne les poses théâtrales pour ne s’intéresser qu’aux attitudes toutes simples et bien plus émouvantes de la vie réelle.

Il règne au sujet du dessin des erreurs qu’il est difficile de redresser.

On s’imagine que le dessin peut être beau en lui-même. Il ne l’est que par les vérités, par les sentiments qu’il traduit. L’on admire les artistes, forts en thème, qui calligraphient des contours dénués de signification et qui campent prétentieusement leurs personnages. On s’extasie sur des poses qu’on ne remarque jamais dans la nature et qu’on juge artistiques parce qu’elles rappellent ces déhanche-