Page:Rodin - L’Art, 1911, éd. Gsell.djvu/228

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Pourquoi nos cathédrales gothiques sont-elles si belles ? C’est que dans toutes les représentations de la vie, dans les images humaines qui ornent leurs portails et jusque dans les crosses de plantes qui fleurissent leurs chapiteaux, l’on découvre la marque de l’amour céleste. Partout nos doux imagiers du Moyen-Âge ont vu resplendir l’infinie bonté. Et, dans leur naïveté charmante, ils ont projeté un reflet de bienveillance jusque sur le visage de leurs démons, auxquels ils ont prêté une malice aimable et comme un air de parenté avec les anges.

Voyez n’importe quel tableau de maître, un Titien, un Rembrandt, par exemple.

Chez tous les seigneurs du Titien, on remarque l’énergie hautaine qui, sans aucun doute, l’animait lui-même. Ses opulentes femmes nues se laissent adorer comme des divinités sûres de leur domination. Ses paysages, que décorent des arbres majestueux et qu’empourprent de triomphants couchers de soleil, ne sont pas moins altiers que ses personnages. Sur toute la création, il a fait régner l’orgueil aristocratique : ce fut la constante pensée de son génie.

Une autre sorte de fierté éclaire le masque ridé et boucané des vieux artisans que peignit Rem-