Page:Rodin - L’Art, 1911, éd. Gsell.djvu/309

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bruissements d’ailes et en chansons d’amour ; il s’extasie sur les rides d’argent qui se poursuivent et semblent sourire à la surface des fleuves ; il s’enthousiasme à observer les efforts tentés par Apollon, le dieu d’or, pour écarter les nuages que la terre, au renouveau, élève entre elle et lui comme une pudique amante qui hésite à se dévoiler.

Quel mortel est plus fortuné que celui-là ? Et puisque c’est l’art qui nous enseigne, qui nous aide à goûter de telles jouissances, qui niera qu’il ne nous soit infiniment utile ?

Mais il ne s’agit pas seulement des voluptés intellectuelles. Il s’agit de bien plus. L’art indique aux hommes leur raison d’être. Il leur révèle le sens de la vie, il les éclaire sur leur destinée et par conséquent les oriente dans l’existence.

Quand Titien peignait une société merveilleusement aristocratique où chaque personnage portait écrit sur son visage, empreint dans ses gestes et noté dans son costume, l’orgueil de l’intelligence, de l’autorité et de la richesse, il proposait aux patriciens de Venise l’idéal qu’ils eussent voulu réaliser.

Quand Poussin composait des paysages où semble