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REVANCHE.

C’était un insipide bulletin, farci la plupart du temps de logogriphes et de petits vers à Chloë. Le chevalier de La Morlière trouvait moyen d’y glisser de temps à autre certains contes littéraires de la force d’Angola et des anecdotes du jour qui amusaient les oisifs des cafés et des ruelles.

Saint-Georges le parcourait d’un air distrait lorsque tout d’un coup les arcs de ses sourcils se touchèrent ; il secoua là feuille et la rejeta loin de lui avec mépris.

Pour comprendre ce mouvement du chevalier, il faut savoir que la Gazette des Gazettes s’arrogeait le droit de raconter à sa manière la soirée de Mme de Montesson.

L’étrange incident qui en avait dispersé tous les acteurs formait, on le pense, la partie la plus saillante du récit. Les interprétations injurieuses ne manquaient pas. Cet article, sans signature, était du chevalier de La Morlière…

L’auteur anonyme semblait avoir pris à tâche d’y faire ressortir le courage du jeune marquis de Langey… Attaquer un homme que chacun ne songeait qu’à éviter lui paraissait une action digne des plus beaux temps de la république romaine. Il y avait dans chaque ligne de cette anecdote la malice d’un pamphlet. On y exaltait perfidement la fortune personnelle et la noblesse de Saint-Georges ; on l’y engageait à écrire l’histoire de ses premiers jours aux colonies et à publier un mémoire justificatif tendant à établir qu’il était créole.

L’ignoble méchanceté de La Morlière allait jusqu’à