Page:Rolland - Au-dessus de la mêlée.djvu/25

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

15
PRO ARIS

vous, représentants de l’esprit, qui n’avez point cessé de célébrer la force et de mépriser les faibles, comme si vous ne saviez pas que la roue de la fortune tourne, que cette force un jour pèsera de nouveau sur vous, ainsi qu’aux siècles passés, où du moins vos grands hommes conservaient la ressource de n’avoir pas abdiqué devait elle la souveraineté de l’esprit et les droits sacrés du droit !… Quels reproches, quels remords vous vous préparez pour l’avenir, ô conducteurs hallucinés, qui menez vers le fossé votre nation qui vous suit, ainsi que les aveugles trébuchants de Brueghel !

Les tristes arguments que vous nous avez opposés, depuis deux mois !

1o La guerre est la guerre, dites-vous, c’est-à-dire sans mesure commune avec le reste des choses, au delà de la morale, de la raison, de toutes les limites de la vie ordinaire, une sorte d’état surnaturel, devant quoi il ne reste qu’à s’incliner sans discuter ;

2o L’Allemagne est l’Allemagne, c’est-à-dire sans mesure commune avec le reste des peuples ; les lois qui s’appliquent aux autres ne s’appliquent pas à elle, et les droits qu’elle s’arroge de violer le droit n’appartiennent qu’à elle. C’est ainsi qu’elle peut, sans crime, déchi-

    de détruire, quand on a la force de créer » (Wer stark ist zu schaffen, der darf auch zerstören). — Friedr. Gundolf : Tat und Wort im Krieg, publié dans la Frankf. Zeit. du 11 octobre. — Cf. l’article du vieux Haus Thoma, dans la Leipziger Illustrierte Zeitung, du 1er octobre.