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LA FIN DU VOYAGE

dans Varsovie. Ces bonnes gens qui en reviennent à Brahms, — aux Brahms de tous les arts, aux forts en thèmes, aux fades néoclassiques, par besoin d’apaisement ! Dirait-on pas qu’ils sont exténués de passion ! Vous êtes bientôt fourbus, mes amis… Non, ce n’est pas de votre ordre que je parle. Le mien n’est pas de la même famille. C’est l(ordre dans l’harmonie des libres passions et de la volonté… Christophe s’étudiait à maintenir dans son art le juste équilibre des puissances de la vie. Ces accords nouveaux, ces démons musicaux qu’il avait fait surgir de l’abîme sonore, il les employait à bâtir de claires symphonies, de vastes architectures ensoleillées, comme les basiliques à coupoles italiennes.

Ces jeux et ces combats de l’esprit l’occupèrent, tout l’hiver. Et l’hiver passa vite, bien que parfois, le soir, Christophe, terminant sa journée et regardant derrière soi la somme de ses jours, n’aurait pas su se dire si elle était longue ou courte, et s’il était encore jeune ou s’il était très vieux.

Alors, un nouveau rayon de soleil humain perça les voiles du rêve et, une nouvelle fois encore, ramena le printemps. Christophe reçut une lettre de Grazia, lui disant qu’elle venait à Paris, avec ses deux enfants. Depuis long-