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Jean-Christophe

la mort, que Louisa aperçut l’enfant, blême, les yeux dilatés, la bouche crispée, qui serrait convulsivement la poignée de la porte. Elle courut à lui. Il fut pris d’une crise dans ses bras. Elle l’emporta. Il perdit connaissance. Il se retrouva dans son lit, hurla d’effroi, parce qu’on l’avait laissé seul un instant, eut une nouvelle crise, et s’évanouit encore. Il passa le reste de la nuit et la journée du lendemain dans la fièvre. Enfin il s’apaisa et tomba, la seconde nuit, dans un sommeil profond, qui se prolongea jusqu’au milieu du jour suivant. Il avait l’impression qu’on marchait dans la chambre, que sa mère était penchée sur son lit et l’embrassait ; il crut entendre le chant doux et lointain des cloches. Mais il ne voulait pas remuer ; il était comme dans un rêve.

Quand il rouvrit les yeux, son oncle Gottfried était assis au pied du lit. Christophe était brisé, et ne se souvenait de rien. Puis la mémoire lui revint, et il se mit à pleurer. Gottfried se leva, et l’embrassa.

— Eh bien, mon petit, eh bien ? disait-il doucement.

— Ah ! oncle, oncle ! gémissait l’enfant, en se serrant contre lui.

— Pleure, disait Gottfried, pleure !

Il pleurait aussi.

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