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JEAN-CHRISTOPHE À PARIS

malheur l’avait rendue sauvage. Sans doute, à vivre avec Olivier, elle avait fini par subir la contagion de sa timidité. Sauf avec son frère, elle avait peine à parler. Tout l’effarouchait : une visite lui faisait peur. Aussi, elle avait une angoisse nerveuse à la pensée qu’il lui faudrait maintenant vivre chez des étrangers, causer avec eux, être constamment en scène. La pauvre petite n’avait d’ailleurs, pas plus que son frère, la vocation du professorat : elle s’en acquittait en conscience, mais elle n’y croyait pas, et elle ne pouvait être soutenue par le sentiment de l’utilité de sa tâche. Elle était faite pour aimer, et non pas pour instruire. Et de son amour, nul ne se souciait.

Nulle part, elle n’en trouva moins l’emploi que dans sa place nouvelle, en Allemagne. Les Grünebaum, chez qui elle était chargée d’apprendre le français aux enfants, ne lui témoignèrent pas le moindre intérêt