Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 6.djvu/65

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

49
ANTOINETTE

quelques mois étaient passés, les obligés de M. Jeannin s’habituaient à penser que ce service leur était dû ; et même, ils avaient un penchant à croire que, pour que M. Jeannin eût manifesté tant de plaisir à les aider, il fallait qu’il y eût trouvé son intérêt. Les plus délicats se croyaient quittes — sinon de leur dette, au moins de leur reconnaissance, — avec un lièvre qu’ils avaient tué, ou un panier d’œufs de leur poulailler, qu’ils venaient offrir au banquier, le jour de la foire du pays.

Comme jusqu’à présent il ne s’était agi, en définitive, que de petites sommes, et que M. Jeannin n’avait eu affaire qu’à d’assez honnêtes gens, il n’y avait pas eu grand inconvénient à cela : les pertes d’argent, — dont le banquier ne soufflait mot à qui que ce fût, — étaient minimes. Mais ce fut autre chose, du jour où M. Jeannin se trouva sur le chemin d’un certain intrigant, qui lançait une grande affaire industrielle,