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LE BUISSON ARDENT

chée, avec une face rasée et sérieuse de vieux paysan. Il était pieux, et connaissait comme pas un tous les bruits qui couraient sur toutes les âmes de sa paroisse. Bäbi et Sami pensaient à s’épouser ; ils appréciaient, l’un dans l’autre, leurs qualités sérieuses, leur foi solide et leur méchanceté. Mais ils ne se pressaient pas de conclure ; ils s’observaient prudemment. — Dans les derniers temps, les visites de Sami étaient devenues plus fréquentes. Il entrait sans qu’on le sût. Toutes les fois qu’Anna passait près de la cuisine, par la porte vitrée elle apercevait Sami assis près du fourneau, et Bäbi à quelques pas, cousant. Ils avaient beau parler, on n’entendait aucun bruit. On voyait la figure épanouie de Bäbi et ses lèvres qui remuaient ; la grande bouche sévère de Sami se plissait, sans s’ouvrir, d’un rire grimaçant : rien ne sortait du gosier ; la maison semblait muette. Quand Anna entrait dans la cuisine, Sami se levait respectueusement et restait debout, sans parler, jusqu’à ce qu’elle fût sortie. Bäbi, en entendant la porte qui s’ouvrait, interrompait avec affectation un sujet indifférent, et tournait vers Anna un sourire obséquieux, en attendant ses ordres. Anna pensait qu’ils parlaient d’elle ; mais elle les méprisait trop pour s’abaisser à les écouter en cachette.