Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 1.djvu/103

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prairies, des routes d’autos étaient percées ; et l’on entendait, au fond des bois, grincer un tramway électrique. Annette voulait fuir. Mais on était fatiguées par la nuit et le jour de voyage étouffants ; on ne savait où aller ; on n’avait envie que de rester étendues, sans bouger : du moins, ou on était, si tout avait changé, l’air avait conservé sa pureté de cristal ; Sylvie le suçait de la langue, comme ces glaces qu’à Paris, au milieu du brouhaha des rues, debout près de la voiture d’un marchand ambulant, elle léchait dans la coupe de verre. On se dit qu’on resterait quelques jours, jusqu’à ce qu’il fit moins chaud. Et puis, on s’habitua. On y trouva du charme.

La saison était animée. Un match de tennis attirait une alerte jeunesse de trois ou quatre nations. Il y avait des sauteries, de petites représentations. Un essaim bourdonnant flânait, flirtait, paradait. Annette s’en fût passée. Mais Sylvie s’amusait franchement ; et le plaisir qu’elle montrait se communiqua à sa sœur. Toutes deux étaient de belle humeur, et n’avaient aucune raison de bouderies divertissements de leur âge.

Jeunes, gaies, attrayantes, chacune à sa manière, elles ne tardèrent pas à être très entourées. Annette était en beauté. Dans le plein air et les sports, elle se montrait à son