Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/272

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fureur de revoir l’ami, avant d’être consumé.

À contre-cœur, sa mère laissait Annette pénétrer dans la chambre, car le malade l’exigeait ; mais ils ne se parlaient guère ; la visite se passait maintenant en une station silencieuse. Lorsque Annette entrait, les yeux de Germain la fouillaient, puis s’éteignaient déçus ; et toute sa force se ramassait sur sa souffrance. Annette vainement essayait de le distraire. Rien ne l’intéressait. Elle s’interrompait, au milieu d’un récit. Mais quand, se sentant inutile, elle voulait se lever pour partir, il la retenait du geste, avec un dur reproche. Et ce reproche, elle ne pouvait le repousser. Elle s’accusait d’avoir fait luire une espérance, qu’elle n’était pas à même de réaliser.

Un jour — ils étaient seuls : la mère reconduisait le médecin, qui avait, une fois de plus, tenté de le leurrer — il prit le poignet d’Annette, et dit :

— Je suis perdu.

Elle essaya de protester. Il répéta :

— Je suis perdu. Je le sais. Je veux, je veux le revoir.

Elle fît un geste découragé. Il ne lui laissa pas le temps de parler :

— Je veux, dit-il durement.

— Que sommes-nous pour vouloir ? fit-elle.

— C’est vous qui dites cela ? Vous ?