Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 4.djvu/185

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— Tais-toi, dit-elle. Ce soir, c’est à moi de parler.

Maintenant qu’elle allait parler, il eût presque souhaité qu’elle se tût.

— Fais la lumière, dit-elle. Et tourne la clef de la porte, que personne ne nous dérange !

Elle commençait à peine, qu’on vint, en effet, frapper. Sylvie, sans doute. La porte resta fermée.

Sans émotion apparente, Annette fît, à grandes lignes, le récit de son passé, les fiançailles rompues. Elle s’exprimait avec une pudeur hautaine, qui ne livre rien de ce qui lui appartient à soi seule, mais qui ne cache rien de ce qu’elle doit et veut dire. Elle tâchait, en parlant, de refouler l’obsession de ce que pensait celui qui écoutait. Il ne manifestait rien. Il écoutait, glacé. Il semblait que le fils et la mère fussent tous deux étrangers aux événements lointains, dont l’image défilait sur l’écran. Dieu sait pourtant avec quelle anxiété elle guettait — (mais sans rien consentir pour l’appeler) — une onde de sympathie ! Il resta impénétrable jusqu’à la fin du récit. Et alors, quand elle restait dans l’attente du verdict qu’il allait prononcer, il fit cette seule remarque :

— Tu ne m’as pas dit son nom.