Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 4.djvu/248

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— Je ne te préfère que trop, cruel enfant ! Je donnerais le reste du monde, pour te garder.

— Eh bien, sois avec moi, et sois comme moi : choisis ! Tu rêves trop. Tu flottes, comme le flux et le reflux, qui monte et qui retombe, sans avancer. Il faut avancer, coûte que coûte. Briser, pour aller droit sa route à soi !

— Mais si elle aboutit à un mur ? Si on s’y trouve seul ? Si le reste du monde est de l’autre côté ?

— Il marche seul, qui va le premier. Mais s’il va seul, c’est qu’il se sait un pionnier. Chaque avancée de l’homme isolé sera la route du monde entier.

— C’est un Credo. Et il en est, presque autant que d’hommes. Je crois aux hommes plus qu’aux Credo. Et je voudrais les embrasser, tous ces fous, dans la même indulgente maternité.

— Ils n’en veulent point. Ils refusent le sein. Ils sont sevrés. Il nous faut croire, agir, détruire, marcher, lutter, mais avancer… Tu sais le mot sur la patrie : « Un campement dans le désert… » Allons plus loin, portant sur notre dos les piquets et la toile de la tente !

— Mon campement est fixé. Il est la loi du cœur.