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contre le mort qui, après lui avoir infligé un absurde pensum, décampait sans payer.

Il fronçait le sourcil, rageur, sombre comme une nuée. Un clair regard de jeune fille passa au travers. Il reconnut les yeux gris d’une brune au teint mat, sa camarade de cours. Leur sourire moqueur le détendit. Elle avait déjà passé. Ses fines jambes, d’un pas tranquille et preste, se dirigeaient vers la Sorbonne. Après une brève réflexion, il la suivit. La bibliothèque de l’Université était devenue, en ces temps, un quartier-général pour quelques-uns de ces jeunes gens : ils y venaient mettre en commun leurs incertitudes. Il rattrapa Henriette Ruche dans l’escalier. Les yeux de malice l’examinèrent :

— « L’œil battu. Le teint gris. La mine ténébreuse… Lendemain de fête !… »

— « Elle ne paraît point vous avoir troublée. Vous avez, vous, la mine reposée. »

— « J’ai bien dormi, oui. Merci. »

— « Et vous n’avez pas été tentée de mettre dehors votre nez pointu ? »

— « De ma fenêtre. J’ai assez vu. La fosse aux bêtes. »

— « J’en étais une. »

— « Cela va sans dire ! »

— « Merci ! » fit-il, d’un air piqué.

Elle rit :

— « Vous croyiez donc que j’en doutais ? »

— « De mieux en mieux ! »

Ils étaient sur le seuil de la bibliothèque. Elle tapota ses cheveux, en se regardant dans la vitre :

— « Une de plus ou de moins !… Il ne faut pas s’en affecter… »

Elle entra dans la salle de lecture.

Marc aperçut quelques-uns de ses amis.

Le nom d’  « amis » était beaucoup dire. Les amitiés n’étaient pas fortes entre ces garçons. Chacun était