Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 5.djvu/61

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J’ai mis dans la forêt le maître-louvetier. Qu’il apprenne son métier ! »

Elle riait au cher garçon, qui répliquait au rire par des yeux orageux.., — « Quel sans-cœur est ta mère ! pensait-elle, amusée. N’est-ce pas, mon pauvre Marc ? Tu en as, devant toi, des peines et des combats ! Et elle ne te plaint pas ?… Va, elle sait (et tu sais) qu’il faut passer par là, qu’il faut y passer seul, et que tu en sortiras, battu, moulu, blessé peut-être, mais bronzé. Je ne me soucie pas d’une vertu sans risques conservée à l’abri. Risque ! Et plonge sept fois sept dans le feu ! Quand tu en ressortiras, tu me diras merci. »

C’est pourquoi elle comprit qu’il souhaitât de s’évader d’elle et de sa maison. Si libre qu’elle le laissât et quoiqu’elle s’abstînt prudemment de le questionner sur ce dont il ne parlait point le premier, la susceptibilité de Marc s’imaginait qu’il était surveillé. Il se gênait dans ses mouvements, et s’irritait de l’entrave ; mais il reculait devant son désir courroucé de le dire à sa mère. Elle n’eut pas besoin qu’il le lui dît : ses brusqueries rancunières, ses silences orageux parlaient. Elle prit les devants. — Aussi bien, les circonstances matérielles rendaient difficile l’habitation en commun. Les exigences d’un nouveau bail obligeaient à quitter le vieil appartement, et la crise du logement ne laissait entrevoir aucune possibilité de retrouver dans Paris, à des prix abordables, une installation qui leur convînt. Enfin, l’argent manquait ; et sa chasse allait probablement forcer Annette à quitter Paris.