Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 6.djvu/27

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— « Mais justement parce que tu as raison, il te faut être indulgente à mon garçon. Il ne sait pas ! Ils ne savent pas, ces pauvres garçons ! C’est à nous qui savons, de les comprendre et de les aimer comme ils sont. »

— « C’est bien comme il est que je l’aime ! S’il était autre, je ne l’aimerais pas. »

— « Alors, pourquoi est-ce que tu le tourmentes et que tu te tourmentes ? »

— « Parce qu’il me tourmente. »

— « C’est un enfant. C’est ton enfant. L’homme qui nous aime est notre enfant. Il faut le bercer, lui donner le sein ; et s’il nous mord, ce jeune chien, c’est qu’il se fait sur nous les dents. C’est un bon chien. »

Assia promenait ses mains sur les bras d’Annette.

— « Qu’est-ce que tu cherches ? »

— « Les marques des crocs. »

Annette retira ses bras :

— « Indiscrète ! »

— « Racontez-moi ! »

— « Que je te raconte ? Et quoi ? »

— « Une de vos histoires avec vos chiens. »

Annette redit la fin de la copla :


— « Y el aima no te la doy,
Porque esa prenda no es mia. »


— « Alors, on ne peut la partager avec personne ? Cette âme, il faut la garder pour soi seule ? »

— « Non pas pour toi ! »

— « Pour qui, alors ? »

— « Pour elle. »

— « Je ne comprends pas », dit Assia.

— « Moi non plus », dit Annette. « Mais c’est ainsi ».