Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 6.djvu/362

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Mais son avant ? Mais le front de bataille ? Il était clair que Marc n’avait pas le temps de résoudre dans la mêlée tous ses antagonismes de pensée. L’action n’avait pas le temps d’attendre. L’action prend. Une fois pris, plus possible de se dégager ! Plus rien de soi à réserver ! Chaque mouvement commande l’esprit. L’acte veut toutes les forces de la pensée, quand on est en face de l’ennemi. Qui en distrait une parcelle, risque la mort, risque bien plus, risque la ruine de son parti et de sa cause… Hâte-toi donc de penser avant que le clairon de la charge ait sonné ! — « Es muss sein… » Il faut qu’advienne ce que doit. Et il ne peut advenir que par nos bras. Le : « Cela doit être », c’est le : « Je dois l’être ». C’est nous, le Destin !

Or, le Destin ne peut s’accomplir aujourd’hui — (qui pense, le sait, sans possibilité d’échappatoire) — que par le déchaînement des forces élémentaires, une vague de fond, un ras de marée qui balaie tout. Il n’est pas permis à Marc de l’ignorer ; il prévoit, il voit, comme s’il y était déjà mêlé, la férocité des luttes sociales qui s’apprêtent, qui déjà se livrent dans une partie de l’Europe, et l’effroyable menace des nationalismes d’Asie, ivres de vengeance et déréglés, dont le