Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 6.djvu/614

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Les deux amis, ses compagnons d’âge et de combat, — Julien Davy, le comte Chiarenza — sont loin. Leur voix se fait rare et semble venir d’autres planètes.

Bruno a repris ses pèlerinages en Asie centrale. Il y participe à des fouilles de villes mortes, ensevelies dans le sable. Il semble s’y enliser aussi. Pendant des mois, il disparaît. De loin en loin, une note de presse signale, en défigurant son nom, une découverte qu’il a faite d’inscriptions summériennes. Sa voix fidèle manque rarement à l’appel d’une date anniversaire : le jour de Marc. Si elle n’est là, elle est en route. Elle vient parfois de lieux fort éloignés de ceux où les journaux, toujours en retard, ont éventé sa présence ; et de ce qu’il fait, de ce qui l’occupe, il ne dit presque rien. Il reprend, sous quelque variante ingénieuse, l’entretien de Narada : c’est comme le thème de ses pensées. Là-dessus, il n’a plus grand’chose à apprendre à Annette ; sur ce thème, elle peut broder aussi des variations. — Mais ni l’un ni l’autre n’est pressé de rapporter le verre d’eau !… L’âme d’Occident ne se rend point. Agir, agir, agir éternellement… Gœthe, près de la mort, disait que « la conviction de la survie procédait, chez lui, de la notion de l’activité ». Nous