Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 6.djvu/82

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passée, dans son lit ; et un mufle chaud lui soufflait dans le dos. Elle eut juste le temps de se retourner : penché sur elle, Djanelidze la flairait. Et sa large patte, se posant sur elle, la renversa…


Quand elle se rassit sur le plancher, elle avait l’œil égaré, la bouche sèche, le corps en feu, l’air sauvage. Ils ne se disaient pas un mot. Elle ne songeait pas à l’accuser, à s’accuser. C’était écrit ! Mais il n’eût pas fallu qu’il s’aventurât encore à la toucher ! La herse entre eux était retombée. Il le comprenait parfaitement, car il avait l’intelligence la plus rare, celle du corps. Il s’écarta, et debout, roulant une cigarette, il la regardait à ses pieds, froide et sombre, qui rajustait sa chevelure. Il n’y avait en lui aucun orgueil de vainqueur. Il n’avait point préparé, ni voulu cette prise ; la nature seule avait tout fait : il n’y avait plus à s’y attarder.

Assia acheva de ranger la malle, dont une partie du contenu était ressortie. Tout mis en ordre, elle rabattit le couvercle, il pesa dessus, ferma, boucla. Elle se releva, remit son manteau. Il dit :

— « Descends ! Il vaut mieux pour toi que nous ne ressortions pas ensemble ! »

Elle s’inspectait dans un miroir de poche. Quand elle fut prête, elle se dirigea vers la porte. Il dit, lui tendant la main :

— « Adieu, camarade. »

Elle se retourna, et elle lui mit sa main dans la main. Tandis qu’il la tenait, — (ils se regardaient avec sérieux, elle son dur front penché, mais les yeux sondant les yeux,) — il lui dit :

— « Et amène-nous ton mari ! Je compte sur toi et sur lui. »