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LES PRÉCURSEURS

poème de Zweig le montre avec grandeur. Au dénouement du drame, Israël écrasé, quittant sa ville en ruines, pour les chemins de l’exil, va à travers les temps, plein d’une joie intérieure qu’il n’avait jamais connue, et fort de ses sacrifices, qui lui ont rendu conscience de sa mission.

La scène I montre « L’éveil du prophète ». — Une nuit de premier printemps. Tout est calme. Jérémie, réveillé en sursaut par une vision de Jérusalem en flammes, monte sur la terrasse qui domine sa maison et la ville. Il est « empoisonné » de rêves, possédé par la tourmente future, tandis que la paix l’entoure. Il ne comprend pas la force sauvage qui gronde en lui, il sait qu’elle vient de Dieu, et il attend son ordre, anxieux, halluciné. La voix de sa mère qui l’appelle lui semble celle de Dieu. Devant sa mère épouvantée, il prophétise la ruine de Jérusalem. Elle le supplie de se taire, elle s’irrite de ses paroles comme d’un sacrilège ; et, pour lui fermer la bouche, elle le maudit d’avance s’il répand au dehors ses sinistres songes. Mais Jérémie ne s’appartient plus. Il suit le Maître invisible.

La scène II s’intitule « L’attente ».

Sur la grande place de Jérusalem, devant le Temple et le palais du roi, le peuple acclame les envoyés égyptiens, qui sont venus marier au roi Zedekia une fille de Pharaon et contracter alliance contre les Chaldéens. Abimelek le général, Pashur le grand prêtre, et Hananja, le prophète officiel, qui met ses faux oracles au service des passions populaires, surexcitent la foule. Un des plus violents à réclamer la guerre est le jeune Baruch. Jérémie s’oppose au courant furieux. Il condamne la guerre. Aussitôt on l’accuse d’être acheté par l’or de Chaldée. Le faux prophète Hananja célèbre « la sainte guerre, la guerre de Dieu ».