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LES PRÉCURSEURS

Répands sur nous ton baume et berce nos douleurs ! — Elles passeront, et nous. — Toi seule es éternelle.

Frères, unissons-nous, et vous aussi, mes forces, — qui vous entrechoquez dans mon cœur déchiré ! — Entrelacez vos doigts, et marchez en dansant !

Nous allons sans fièvre et sans hâte, — car nous ne sommes point à la chasse du temps. — Le temps, nous l’avons pris. — Des brins d’osier des siècles, ma Paix tisse son nid.

Ainsi que le grillon qui chante dans les champs. — L’orage vient, la pluie tombe à torrents, elle noie — les sillons et le chant. — Mais à peine a passé la tourmente, — le petit musicien entêté recommence.

Ainsi, quand on entend, à l’Orient fumant, — sur la terre écrasée, à peine s’éloigner — le galop furieux des Quatre Cavaliers, — je relève la tête et je reprends mon chant — chétif et obstiné.


(Écrit du 15 au 25 août 1914).[1]


Journal de Genève et Neue Zürcher Zeitung, 24–25 décembre 1915 ; Les Tablettes, Genève, juillet 1917.

  1. Sauf la dernière strophe, qui est de l’automne de la même année.