Page:Rolland - Mahatma Gandhi.djvu/94

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s’élève contre ce nationalisme, qui est une forme de la violence ; il ne peut supporter qu’on fasse de la destruction une sorte de religion : détruire le fruit du travail est un crime. Andrews, qui avait d’abord épousé les réformes de Gandhi, au point de porter le Khaddar, hésite maintenant à le garder : la vue de ces bûchers l’a blessé dans sa foi en le Mahâtmâ. Mais Gandhi, qui publie sa lettre et y répond affectueusement, touché de cette effusion d’un cœur angoissé, déclare qu’il ne regrette rien. Il n’a aucun sentiment hostile pour quelque race que ce soit, et il ne demande pas la destruction de tous les objets étrangers, mais de ceux dont la malfaisance s’est manifestée. Des millions d’indiens ont été ruinés par les manufactures anglaises ; beaucoup sont tombés au rang de parias, ou de soldats mercenaires, et leurs femmes de prostituées. On ne peut sans péché porter ces étoffes criminelles. L’Inde n’est que trop portée à haïr ses exploiteurs anglais. Gandhi détourne sa rancune et la transfère des hommes sur les choses. Les coupables ne sont pas seulement les Anglais qui ont vendu ces tissus, mais les Indiens qui les ont achetés.