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LE RENOUVEAU. 237

Châtelet, et des concerts Pasdeloup, de l’avoir créé de toutes pièces.

Edouard Colonne n’a pas été seulement un grand éducateur du goût musical en France. Personne n’a plus travaillé que lui à abaisser les barrières qui sépa- raient le public français de l’art étranger ; et en même temps il a contribué activement à faire connaître à l’étranger l’art français. Tandis qu’il dirigeait des concerts dans toute l’Europe et en Amérique, il cédait la direction de l’orchestre du Châtelet aux grands Kapellmeister allemands et aux compositeurs étrangers : Richard Strauss, Grieg, Tschaikowsky, Hans Richter, Hermann Levi, Mottl, Nikisch, Mengelberg, Siegfried Wagner, et tant d’autres. Nul chef d’orchestre n’a plus fait pour la musique parisienne depuis trente ans. Il convient de ne pas l’oublier*.

Les concerts Lamoureux ont eu, dès l’origine, un caractère assez différent des concerts Colonne. Cette différence tenait à la personnalité des deux directeurs. Elle tenait aussi à ce que les concerts Lamoureux, quoique postérieurs de moins de dix ans aux concerts Colonne, représentaient ime nouvelle génération musicale. Le progrès avait été singulièrement rapide : à peine le riche trésor de la musique de Berlioz avait-il été exploré, qu’on se lançait à la découverte du monde wagnérien. Il fallait là un nouveau guide, ayant une connaissance spéciale de cet art, et en général de l’art allemand. Charles Lamoureux fut ce guide. Déjà, en 1873, il avait dirigé de grandes exécutions de Bach et de Haendel, données par la Société de l'Harmonie sacrée. Il venait de quitter la direction de l’orchestre de l'Opéra, quand il inaugura, le 21 octobre 1881, au théâtre du Château-d’Eau, la Société des Nouveaux

1. On sait que M. Colonne s’est dès & présent adjoint comme suppléant et comme futur successeur M. Gabripl Pierné.