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du contrat social

que toute dépendance particulière est autant de force ôtée au corps de l’état ; l’égalité, parce que la liberté ne peut subsister sans elle.

J’ai déjà dit ce que c’est que la liberté civile : à l’égard de l’égalité, il ne faut pas entendre par ce mot que les degrés de puissance et de richesse soient absolument les mêmes ; mais que, quant à la puissance, elle soit au-dessus de toute violence, et ne s’exerce jamais qu’en vertu du rang et des lois ; et, quant à la richesse, que nul citoyen ne soit assez opulent pour en pouvoir acheter un autre, et nul assez pauvre pour être contraint de se vendre[1].

Il faut donc à la force publique un agent propre qui la réunisse et la mette en œuvre selon les directions de la volonté générale, qui serve à la communication de l’état et du souverain… Voilà quelle est, dans l’état, la raison du gouvernement, confondu mal à propos avec le souverain, dont il n’est que le ministre.

  1. Voulez-vous donc donner à l’état de la consistance, rapprochez les degrés extrêmes autant qu’il est possible ; ne souffrez ni des gens opulents ni des gueux. Ces deux états, naturellement inséparables, sont également funestes au bien commun ; de l’un sortent les fauteurs de la tyrannie, et de l’autre les tyrans : c’est toujours entre eux que se fait le trafic de la liberté publique ; l’un l’achète, et l’autre la vend.