Page:Rolland - Vie de Tolstoï.djvu/235

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« Digne de pitié et ignorant l’homme qui cherche ce qu’il possède et ignore qu’il le possède. Oui, misérable et ignorant l’homme qui ne connaît pas le bien de l’amour qui l’entoure et que je lui ai donné ! » (Krishna).

« L’homme n’a qu’à vivre en accord avec la loi de l’amour, qui est propre à son cœur et qui recèle en soi le principe de Non-Résistance, de Non-Participation à toute violence. Alors, non seulement une centaine d’hommes ne pourraient asservir des millions, mais des millions ne pourraient asservir un seul. Ne résistez pas au mal et ne prenez pas part à ce mal, à la contrainte de l’administration, des tribunaux, des impôts, et surtout de l’armée ! — Et rien, ni personne au monde ne pourra vous asservir ! »

Une citation de Krishna termine (comme elle a commencé) cette prédication de la Non-Résistance faite par la Russie à l’Inde :

« Enfants, levez plus haut vos regards aveuglés, et un monde nouveau, plein de joie et d’amour, vous apparaîtra, un monde de Raison, créé par Ma Sagesse, le seul monde réel. Alors, vous connaîtrez ce que l’amour a fait de vous, ce dont il vous a gratifiés et ce qu’il exige de vous. »

Or, cette lettre de Tolstoy tombe dans les mains d’un jeune Indien, qui était « homme de loi », à Johannesburg, en Sud-Afrique. Il se nommait Gandhi. Il en fut saisi. Il écrivit à Tolstoy, vers la fin de 1909[1]. Il lui annonçait la campagne de sacrifice, qu’il dirigeait depuis une dizaine d’années, dans l’esprit évangélique de Tolstoy[2]. Il lui demandait

  1. De Londres. La lettre est perdue. On ne la connaît que par la réponse de Tolstoy.
  2. Dans son Autobiographie, en cours de publication, sous le titre : Histoire de mes Expériences avec la Vérité (Young India, 26 août et 14 octobre 1926), Gandhi raconte que ce fut en 1893-94 qu’il lut pour la première fois un ouvrage de