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VI

IL N’EXISTE DANS LE PASSÉ QU’UN RÉPERTOIRE DE LECTURES POPULAIRES, NON DE THÉÂTRE POPULAIRE. — LES LECTURES NE SUFFISENT POINT. LE THÉÂTRE EST NÉCESSAIRE.


Nous sommes arrivés au terme de cette course à travers le passé. Que nous reste-t-il dans les mains de toutes ses richesses ? Une poignée d’œuvres, dont pas une ne demeure entière. Un répertoire de lectures populaires ; mais de théâtre, point.

Pourquoi ne pas nous résigner, pourquoi ne pas nous en tenir, comme fit Maurice Bouchor, et tant d’autres à sa suite,[1] au système des lectures abrégées, avec conférences, résumés des scènes omises, et conclusions morales ? — En premier lieu, parce que, — nous le disons franchement, — ce n’est pas seulement le bien du peuple que nous avons en vue, c’est le bien de l’art, c’est la grandeur de l’esprit humain. Entre toutes ses créations, qui seules donnent son prix à la vie, nous avons une admiration sans bornes pour le théâtre, son œuvre : statue de l’homme, sculptée par l’homme dans sa propre pensée, image brûlante de l’univers, univers lui-même plus grand que le premier. Le genre faux des

  1. Il ne faut pas oublier le nom de Dickens, qui, par l’intérêt et le succès extraordinaire de ses lectures publiques, dès 1853 à Birmingham, mais surtout de 1858 à 1870, en Angleterre et en Amérique, fut en quelque sorte le génial précurseur de ce mouvement.
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