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DÉVELOPPEMENT DE i/OPÉRA ARISTOCRATIQUE EN ITALIE. 151

rionnettes, peintre, mathématicien, voyageur, et pour achever, ermite et pénitent.

Le théâtre, surtout le théâtre de musique, finit par devenir une passion maladive, qui a tous les symptômes d'une folie géné- rale (1). J'ai noté dans quel état le chant de Vittori mettait ses auditeurs (2) ; j'ai rappelé les sanglots des théâtres de Mantoue (3) et de Parme (4).

L'influence n'est pas seulement physique. Qui le croirait? Ces divertissements mondains, ces sensualités artistiques, produi- sent des conversions, des désordres moraux, aussi bien que Parsifal. Acciajoli se retire deux fois l'an, en cachette, entre deux bouffonneries musicales, dans un oratoire au milieu des montagnes (5) ; il y pleure, et s'y donne la discipline. Les fillettes de Rome ont le cerveau tourné, depuis qu'elles ont vu la Baltasare, la sainte comédienne de S. S. Clément IX (6). Les couvents où la musique est entrée, sont en peu de temps rongés par la corruption (7).

Bientôt la contagion se répandra en France, s'il faut en croire la mauvaise comédie de Saint-Evremond (8), qui est une carica-

��dro de Francesco Antonio Pistochini , poésie du comte Camillo Badovero, « exécuté par des figures de bois que l'on fait mouvoir avec un mécanisme, tandis que les musiciens chantent derrière la scène. »

(1) En 1678, à Rome, ily a 130 comédies jouées en maisons particulières, A Bologne, plus de 60 théâtres privés (sans parler des couvents et collèges). A Venise, Kiesewetter compte, de 1637 à 1700, plus de 357 opéras repré- sentés (de 40 compositeurs), etc.

(2) Voir plus haut.

(3) Voir l'Ariane de Monteverde, p. 88.

(4) Voir le Torneo de 1628, et Settimia Caccini, p. 119, note 2.

(5) Il s'est fait construire un « Romitorio » dans les montagnes de Spoléte.

(6) « 3 juin 1668. — La donzella che fuggi da casa la signora donna Cate- rina si è trovata in Castelnuovo, sola vestita da huomo, infervorata di farsi romita ad imitazione di S. Baldassara la cui vita fu rappresentata più volte in Casa Rospigliosi questo Carnevale. » (Avvisi di Roma.)

(7) En 1648, Innocent X est forcé d'éteindre la Religion des « Chierici Regolari Ministri degli Infirmi, » pour leurs désordres scandaleux. Ce sont précisément ces pères qui donnèrent les premiers, à Rome, l'exemple des opéras de couvents, en 1636.

(8) Œuvres de Monsieur de Saint-Evremond, publiées sur ses manuscrits, avec la vie do l'auteur, par M. Desmaizeaux. Amsterdam, 1739, t. III. — Les Opéra, comédie.

Deux personnages sont ainsi désignés : « Mademoiselle Crisotine, lour fille, devenue folle par la lecture des Opéra. » — « Tirsolet , jeune homme de Lyon, devenu fou par les Opéra comme elle. »

« Je revins de Paris, » dit M. Guillaut, « environ quatre mois après la

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