Page:Rolland Vie de Michel-Ange.djvu/113

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
AMOUR

n’est égal ». Il lui fait don de tout son présent, de tout son avenir ; et il ajoute :

Ce m’est une douleur infinie de ne pouvoir vous donner aussi mon passé, pour pouvoir vous servir plus longtemps ; car l’avenir sera court : je suis trop vieux…[1] Je ne crois pas que rien puisse détruire notre amitié, bien que je parle d’une façon très présomptueuse ; car je suis infiniment au-dessous de vous.[2]… Je pourrais aussi bien oublier votre nom que la nourriture dont je vis ; oui, je pourrais plutôt oublier la nourriture dont je vis, et qui soutient seulement le corps, sans plaisir, que votre nom qui nourrit le corps et l’âme, et les remplit d’une telle douceur, qu’aussi longtemps que je pense à vous, je ne sens ni souffrance, ni crainte de la mort.[3] — Mon âme est dans les mains de celui à qui je l’ai donnée…[4] Si je devais cesser de penser à lui, je crois que je tomberais mort sur-le-champ.[5]

Il fit à Cavalieri de superbes présents :

D’étonnants dessins, des têtes merveilleuses au crayon rouge et noir, qu’il avait faits dans l’intention de lui apprendre à dessiner. Puis, il dessina pour lui un Ganymède porté au ciel par l’aigle de Zeus, un Tityos avec le vautour se nourrissant de son cœur, la Chute de Phaéton dans le Pô, avec le char du Soleil et une Bacchanale d’enfants : toutes œuvres de la plus rare beauté et d’une perfection inimaginable.[6]

Il lui envoyait aussi des sonnets, admirables parfois, souvent obscurs, dont certains furent bientôt récités

  1. Lettre de Michel-Ange à Cavalieri (premier janvier 1533).
  2. Brouillon d’une lettre de Michel-Ange à Cavalieri (28 juillet 1533).
  3. Lettre de Michel-Ange à Cavalieri (28 juillet 1533).
  4. Lettre de Michel-Ange à Bartolommeo Angiolini.
  5. Lettre de Michel-Ange à Sébastien del Piombo.
  6. Vasari.
111