Page:Romains - Les Copains.djvu/27

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front, s’enroulaient à sa moustache, tremblotaient devant sa bouche.

La table poussa un cri femelle. On aima Bénin. On aurait voulu l’embrasser. Quel homme de ressources ! Quel vivant généreux ! On venait de le chasser pour une plaisanterie excellente ; il se vengeait par une plaisanterie meilleure, dont il faisait les frais à lui seul.

On l’appela : « Mon vieux Bénin ! ». On lui tapa sur le ventre. On l’assit au centre de l’assemblée, au nœud de la chaleur, au point que tous regardaient nécessairement. On se complaisait en lui.

Il parla, d’une voix un peu épaisse :

— Qu’est-ce que vous avez à rire ?

Ses voisins s’empressèrent de lui expliquer que cette joie n’avait rien que de flatteur, qu’au lieu d’en prendre ombrage… Il interrompit :

— Oui, me revoilà ! Ce n’est pas comique. Vous n’espériez tout de même pas m’avoir envoyé dans l’autre monde… L’autre monde