Page:Romains - Les Copains.djvu/88

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Sur ces mots, Bénin prit un visage sévère, salua froidement, remonta sur sa machine et s’éloigna d’un coup de pédale.

Il sortit sa montre :

— Quatre heures vingt. Ce loufoque m’a parlé d’un certain train de quatre heures quarante. Reste à savoir ce qu’il faut entendre là-dessous. Que Broudier ait dicté ces vertueux alexandrins, n’en doutons pas. Mais Broudier, pour classique qu’il soit, n’est que le Boileau des fumistes. C’est vrai ! Il y a néanmoins des choses sacrées, entre lui et moi. Je le connais. Une vadrouille avec un copain, avec moi, une vadrouille aussi gigantesque, qui plus est, une affaire d’honneur, non ! Broudier ne s’en joue pas. Il se fiche de moi quant à la forme ; il est sérieux quant à la matière. S’il n’est pas venu, c’est qu’il n’a pas pu venir. S’il me désigne Nevers, c’est qu’il y est, ou qu’il y sera. L’oncle Prosper a place au rang des mythes, je le crains, mais qu’importe ? En tout cas, qu’est-ce que ça me coûte d’aller