Page:Rosny - La Guerre du feu.djvu/148

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— Voilà ! C’est la force de Naoh… Avec la sagaie aiguë, il aurait terrassé le Nain Rouge.

Alors seulement, il battit en retraite au milieu des glapissements de l’ennemi. Il préféra aller jusqu’au bout de l’arête : il y avait place pour plusieurs hommes et les Nains Rouges devraient attaquer sur une ligne étroite. Du côté de l’eau, à cause des plantes perfides, aucun radeau ne pourrait se faire jour, aucun homme n’oserait se risquer à la nage.

On ne pouvait davantage atteindre un îlot escarpé, qui se dressait à soixante coudées de la levée granitique.

Ayant accumulé des roseaux flétris pour le feu du soir, les Oulhamr n’eurent plus qu’à attendre. De toutes leurs attentes, ce fut la plus terrible. Lorsqu’ils guettaient l’ours gris, ils espéraient, par quelques coups bien portés, anéantir la bête. Lorsqu’ils étaient emprisonnés parmi les pierres basaltiques, ils n’ignoraient pas que le lion-tigre devait s’éloigner pour chercher la proie. Jamais ils n’avaient été cernés par les Dévoreurs d’Hommes…

À présent, la horde qui les assiège a la ruse et le nombre, il est impossible de l’anéantir. Les jours suivront les jours sans qu’elle cesse de veiller devant le marécage, et, si elle ose faire une attaque, comment trois hommes lui résisteraient-ils ?

Ainsi Naoh se trouve pris par la force de ses semblables ; et pourtant, ces semblables sont parmi les plus faibles : aucun d’entre eux ne saurait étrangler un loup ; jamais leurs sagaies légères ne pénétreraient jusqu’au cœur du lion comme les flèches des Oulhamr ; leurs épieux demeureraient impuissants devant l’aurochs, mais ils peuvent atteindre le cœur d’un homme…

Le Fils du Léopard hait la puissance de sa race. Il la sent