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Page:Rosny - La Guerre du feu.djvu/187

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simples et bien connues. Pleins de leur espérance, ils fixaient des sens moins attentifs sur les événements innombrables qui enveloppent et guettent les vivants.

Ils marchèrent jusqu’au crépuscule : Naoh cherchait une courbe de la rivière où il voulait établir le campement. Le jour mourut lourdement au fond des nuages. Une lueur rouge traîna, sinistre et morose, accompagnée du hurlement des loups et de la plainte longue des chiens : ils filaient par bandes furtives, guettaient à l’orée des buissons et des bois. Leur nombre étonnait les nomades. Sans doute quelque exode des herbivores les avait chassés des terres prochaines et rassemblés sur ce sol riche en proies. Ils avaient dû l’épuiser. Leurs clameurs annonçaient la pénurie, leurs allures une activité fiévreuse. Naoh, sachant qu’il faut les craindre lorsqu’ils sont en grand nombre, hâtait la course. À la longue, deux hordes s’étaient formées. Vers la droite, c’étaient les chiens ; vers la gauche, les loups. Comme ils suivaient la même piste, ils s’arrêtaient quelquefois pour se menacer. Les loups étaient plus grands, avec des nuques renflées et musculeuses, les chiens avaient pour eux le nombre. À mesure que les ténèbres mangeaient le crépuscule, les yeux jetaient plus de clarté : Nam, Gaw et Naoh apercevaient une multitude de petits feux verts qui se déplaçaient comme des lucioles. Souvent, les Nomades ripostaient aux hurlées par un long cri de guerre, et l’on voyait refluer toutes ces phosphorescences.

D’abord, les bêtes se tinrent à plusieurs portées de harpon ; avec la croissance des ténèbres, elles se rapprochèrent ; on entendait plus distinctement le bruit mou de leurs pattes. Les chiens parurent les plus hardis. Quelques-uns avaient devancé les hommes. Ils s’arrêtaient brusquement, ils bondissaient avec un cri aigu ou bien rampaient d’une manière sournoise. Mais les loups, inquiets