Page:Rosny - La Guerre du feu.djvu/197

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dix Dévoreurs d’Hommes et vingt Nains Rouges. C’est Naoh qui tuera Aghoo !

— Que Naoh descende dans la plaine !

— Si Aghoo était venu seul, Naoh serait allé le combattre.

Le rire d’Aghoo éclata, vaste comme un rugissement :

— Aucun de vous ne reverra le grand marécage !

Tous deux se turent. Naoh comparait, avec un frisson, les torses minces de Nam et de Gaw aux structures effrayantes des fils de l’Aurochs. Pourtant, ne remportait-il pas le premier avantage ? Car, si Nam était blessé, un des trois frères était incapable de poursuivre un ennemi.

Le sang coulait du bras de Nam. Le chef y appliqua les cendres du foyer et le recouvrit d’herbes. Puis, tandis que ses yeux veillaient, il se demanda comment il allait combattre. Il ne fallait pas espérer surprendre la vigilance d’Aghoo et de ses frères. Leurs sens étaient parfaits, leurs corps infatigables. Ils avaient la force, la ruse, l’adresse et l’agilité ; un peu moins rapides que Nam ou Gaw, ils les dépassaient par le souffle. Seul le fils du Léopard, plus vite dans le premier élan, leur était égal par l’endurance.

La situation se peignait par fragments dans la tête du chef, et, rattachant ces fragments, l’instinct leur donnait une cohérence. Naoh voyait ainsi les péripéties de la fuite et du combat ; il était déjà tout action tandis qu’il demeurait encore accroupi dans la lueur cuivreuse. Il se leva enfin ; un sourire de ruse passa sur ses paupières ; son pied grattait la terre comme le sabot d’un taureau. D’abord, il fallait éteindre le foyer, afin que, même vainqueurs, les fils de l’Aurochs n’eussent ni Gammla ni la rançon. Naoh jeta dans la rivière les plus gros brandons ; aidé par ses compagnons, il tua le Feu avec de la terre et des pierres. Il ne garda en vie que la faible flamme d’une