Page:Rosny - La Guerre du feu.djvu/92

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nacre, des crustacés aux armures articulées, des poissons de course, qu’une flexion lance à travers l’eau pesante, aussi vite que la frégate sur les nues, des poissons flasques qui barbotent lentement dans la fange, des reptiles souples comme les roseaux ou opaques, rugueux et denses. Selon les saisons, les hasards de la tempête, des cataclysmes ou de la guerre, s’abattaient les masses triangulaires des grues, les troupes grasses des oies, les compagnies de canards verts, de sarcelles, de macreuses, de pluviers et de hérons, les peuplades d’hirondelles, de mouettes et de chevaliers ; les outardes, les cigognes, les cygnes, les flandrins, les courlis, les râles, les martins-pêcheurs et la foule inépuisable des passereaux. Vautours, corbeaux et corneilles s’éjouissaient aux charognes abondantes ; les aigles veillaient à la corne des nuages ; les faucons planaient sur leurs ailes tranchantes ; les éperviers ou les crécerelles filaient au-dessus des hautes cimes ; les milans surgissaient, furtifs, imprévus et lâches, et le grand duc, la chevêche, l’effraie trouaient les ténèbres sur leurs ailes de silence.

Cependant, on distinguait quelque hippopotame oscillant comme un tronc d’érable, des martres se glissant sournoisement parmi les oseraies, des rats d’eau à crâne de lapin, tandis qu’accouraient les bandes peureuses des élaphes, des daims, des chevreuils, des mégacéros, les troupes légères des saïgas, des égagres, des hémiones et des chevaux, les armées épaisses des mammouths, des urus, des aurochs. Un rhinocéros plongeait sa cuirasse opaque dans un havre ; un sanglier malmenait les vieux saules ; l’ours des cavernes, pacifique et formidable, roulait sa masse obscure ; le lynx, la panthère, le léopard, l’ours gris, le tigre, le lion jaune et le lion noir s’embûchaient affamés ou happaient la proie chaude ; leur puanteur dénonçait le renard, le chacal et l’hyène ; les bandes