Page:Rosny aîné - La Mort de la Terre - Contes, Plon, 1912.djvu/101

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Rouges, ceux qui palpitaient encore n’étaient plus que des fantômes. Et Targ enveloppa sa race et la race d’Arva d’un long regard d’amour. La clarté des races blondes avait passé d’Érê sur sa fille. Les deux têtes vêtues d’or se touchaient presque : quelle fraîcheur émanait d’elles !… quelles légendes profondes et tendres !

Les autres aussi, malgré leurs visages bistre et leurs yeux d’anthracite, avaient une singulière jeunesse, – le regard ardent de Targ ou l’aptitude au bonheur de Manô.

— Ah ! s’exclama-t-il, qu’il est dur de vous quitter ! Mais le danger serait bien plus grand de partir ensemble !

Tous savaient bien, même les enfants, que le salut était au-dehors, dans quelque coin mystérieux des déserts. Ils savaient aussi que l’oasis, le centre de leur existence, devait toujours être occupée. D’ailleurs, ne communiaient-ils pas, plusieurs fois par jour, par la voix des planétaires ?

— Allons ! fit enfin Targ.

Le frisson subtil des énergies s’entendit aux ailes des planeurs. Ils s’élevèrent, ils décrurent dans le matin de nacre et de saphir. Érê les vit disparaître à l’horizon. Elle soupira. Quand Arva et Targ n’étaient plus là, la fatalité pesait plus lourde. La jeune femme épiait l’oasis avec des yeux craintifs et chaque geste des petits éveillait son inquiétude. Chose bizarre ! Sa peur évoquait des dangers qui n’étaient plus de ce monde. Elle