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DE DENTRECASTEAUX.

1792.
Mai.
n’avoit trouvé que sept brasses sur un fond de sable un peu gros : cette diminution prompte de brassiage auprès d’une terre basse, avoit fait craindre de trouver le passage fermé ; mais il paroît au contraire que ce fond plus élevé est comme un banc formé par la mer qui, entrant en même temps dans ce canal par le Nord et par le Sud, doit déposer et amonceler vers le milieu les sables qu’elle entraîne.

Aux deux extrémités du canal on a vu des naturels sur la rive droite ; M. De Saint-Aignan en a rencontré six, qu’il est parvenu à attirer auprès de lui. L’entrevue a été très-amicale. Cet officier leur a donné deux cravates, qu’ils ont mises autour de leurs têtes : il leur a présenté un cou­teau, dont ils ont paru effrayés tant que cet officier s’en est servi pour leur en faire connoître l’usage, mais bien plus encore lorsque, pour le rendre plus tranchant, il l’aiguisa sur une pierre. À l’autre rive, des canonniers virent aussi des naturels, que la vue d’un couteau ouvert effraya et empêcha d’approcher. Parmi ceux-ci se trouvoit une femme qui, saisie d’effroi, se laissa glisser du haut d’une roche sur le bord de la mer ; elle portoit des racines de fougère liées ensemble, et dont il paroît que ces sauvages se nourrissent, ainsi que ceux de la Nouvelle-Zéelande.

Une circonstance remarquable, c’est que cette femme avoit la gorge et les parties naturelles couvertes : la nudité des femmes vues par le capitaine Cook à la baie de l’Adventure, qui n’est pas éloignée, doit faire soupçonner que la rigueur de la saison plutôt que la décence faisoit

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