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TROISIÈME ACTE.
Cyrano.

« Plus tu me prends de cœur, plus j’en ai !… » Eh bien ! Peuh !…

Roxane.

Et ceci : « Pour souffrir, puisqu’il m’en faut un autre,
Si vous gardez mon cœur, envoyez-moi le vôtre ! »

Cyrano.

Tantôt il en a trop et tantôt pas assez.
Qu’est-ce au juste qu’il veut, de cœur ?…

Roxane, frappant du pied.

Qu’est-ce au juste qu’il veut, de cœur ?… Vous m’agacez !
C’est la jalousie…

Cyrano, tressaillant.

C’est la jalousie… Hein !…

Roxane.

C’est la jalousie… Hein !… …d’auteur qui vous dévore !
— Et ceci, n’est-il pas du dernier tendre encore ?
« Croyez que devers vous mon cœur ne fait qu’un cri,
Et que si les baisers s’envoyaient par écrit,
Madame, vous liriez ma lettre avec les lèvres !… »

Cyrano, souriant malgré lui de satisfaction.

Ha ! ha ! ces lignes-là sont… hé ! hé !

(Se reprenant et avec dédain.)

Ha ! ha ! ces lignes-là sont… hé ! hé ! mais bien mièvres !

Roxane.

Et ceci…

Cyrano, ravi.

Et ceci… Vous savez donc ses lettres par cœur ?

Roxane.

Toutes !

Cyrano, frisant sa moustache.

Toutes ! Il n’y a pas à dire : c’est flatteur !

Roxane.

C’est un maître !

Cyrano, modeste.

C’est un maître ! Oh !… un maître !…

Roxane, péremptoire.

C’est un maître ! Oh !… un maître !… Un maître !…