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Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome II, 1779.djvu/23

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S’embellit à ses yeux des charmes de l’étude !
Les folles passions, leur fausse volupté,
Ne valent point pour lui l’auguste vérité.
Chaque soleil nouveau, le payant de ses veilles,
Fait rouler pour ce sage un cercle de merveilles.
De quel ravissement, dieux ! Il est enyvré,
Si jusqu’au roi du jour son vol a pénétré !
Il revient triomphant, il parle ; et son génie
Des cieux qu’il a franchis révèle l’harmonie,
Marque aux globes errans leur éternel retour,
Et de l’immensité mesure le contour.
A-t-il ouvert des monts les grottes souterreines,
Cherché des minéraux les brillantes arènes,
De leurs riches fillons parcouru les chemins,
Et surpris la nature, à l’instant que ses mains,
Des souffres et des sels, du nître et du bitume,
Épuroient savamment et combinoient l’écume ?
Croyez qu’il n’a point vu sans les plus doux transports,
Dans leurs lits caverneux, se former ces trésors,
Qui bientôt façonnés par l’humaine industrie
Doivent, servant les arts, enrichir la patrie.

Ce gland, ce foible gland dans les bois enfanté,
Et loin d’eux au hazard par les vents emporté,
Aux yeux de l’ignorant à peine humble semence,
Est déjà pour le sage une forêt immense.
L’insecte le plus vil, la fange des marais,
Tout devant lui déploie un trésor de secrets.
Ô noble emploi du tems ! ô veilles fortunées !
Vous agrandissez l’homme, et charmez ses années.
Moi-même, en ce moment, de quel feu créateur
Je sens renouveller mon génie et mon coeur !
Perdu durant l’été dans un monde frivole,
Où sans gloire et sans fruit le tems léger s’envole,
J’oubliois, endormi sur mes premiers essais,
D’en mériter l’honneur par de nouveaux succès :
Je n’étois plus moi-même. ô soudaine merveille !
Dans le calme des bois mon ardeur se réveille ;
Je renaîs, je revole à la cour des neuf soeurs,
Et l’art des vers encor a pour moi des douceurs.
Oui, mon luth tour-à-tour léger, sublime et tendre,
Aux antres du Parnasse ira se faire entendre.
Riche saison des fruits, c’est à toi que mes chants