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Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome II, 1779.djvu/341

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Sans craindre des plaisirs la consolante ivresse ;
Comme on attend la fin d’un jour pur et vermeil,
Pour tomber doucement dans les bras du sommeil.

Quoi ! Parce que la nuit finira la journée,
J’irai, traînant par-tout une ame consternée,
Détourner mes regards de la clarté des cieux,
Je croirai les plaisirs défendus par les dieux,
Et follement épris des vertus d’un faux sage,
Je n’oserai cueillir des fleurs sur mon passage !
Non, non : tels ne sont point les conseils, les leçons,
Que donne la sagesse à ses vrais nourrissons :
Sa voix, sa douce voix aux plaisirs les convie.
Entendez-la crier : « Mortels, goûtez la vie :
Hâtez-vous, saisissez le jour qui vous a lui ;
Et demain au tombeau, jouissez aujourd’hui. »
Mais, dieux ! Autour de moi, quelle clameur sauvage
M’accuse de flatter le honteux esclavage
Des viles passions, des criminels desirs ?
Vous me calomniez, ennemis des plaisirs.
Qu’ai-je fait ? M’a-t-on vu, brisant toute barrière,
Du crime devant l’homme élargir la carrière ?