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Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome II, 1779.djvu/87

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Et le boeuf pacifique, et le coursier ardent,
Et la brebis si douce, et le chien si fidèle,
Et le plaintif oiseau des amans le modèle,
De leurs corps infectés couvrirent les chemins.
Le mal plus irrité passant jusqu’aux humains,
Bientôt on ne vit plus que de hideux fantômes,
Qui d’un air corrompu respirant les atômes,
Se traînoient et tomboient. Leurs yeux sombres, hagards
Brûloient d’un feu de sang, lançoient d’affreux regards.
La douceur du sommeil vainement attendue,
Sur leur corps tout entier une lèpre étendue,
Leurs poûmons tourmentés des accès de la toux,
L’insatiable soif qui les dévoroit tous,
Enfin de mille maux l’exécrable assemblage,
N’épargnant ni le rang, ni le sexe, ni l’âge,
Ni l’innocent amour, ni la sainte amitié,
Bientôt de nos ayeux eût ravi la moitié.
Ils mouroient. Chaque instant voyoit hors des murailles
S’avancer, tout rempli, le char des funérailles.
Nulle voix ne suivoit ce mobile tombeau :
Sans parens, sans amis, sans prêtre, sans flambeau,
Solitaire, il marchoit. à ces monceaux livides,