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Page:Roucher - Les mois, poëme en douze chants, Tome II, 1779.djvu/89

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Quand des flots d’un lait pur écumoient sous ses doigts,
Sa richesse égaloit la richesse des rois.
Hélas ! Qu’il dura peu le bonheur de ce sage !
Le fléau destructeur vers lui s’ouvre un passage,
Emporte ses troupeaux, et rongeant les mortels,
Frappe l’homme sacré qui prioit aux autels :
Puis, du toît solitaire, où le pontife expire,
Sur le peuple des champs il étend son empire.
Déjà plus d’une mère a répandu des pleurs ;
Déjà chaque cabane est en proie aux douleurs.
Le vieillard, au milieu des publiques allarmes,
Lui seul n’a point encor à répandre des larmes.
Il voit Linda, Sainmaurt du fléau respectés.
Pour dérober leurs jours à ses traits infectés,
Dans le temple désert le vieillard se transporte ;
Sur lui, sur ses enfans il en scelle la porte,
Saisi d’un saint effroi s’avance vers l’autel,
L’embrasse, s’y prosterne, et s’écrie : « Immortel !
Des fléaux de la terre auteur impénétrable,
Quand désarmeras-tu ton glaive inexorable ?
Quoi ! Tu détruis ainsi l’ouvrage de tes mains !
Ne serois-tu donc plus le père des humains ?