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D’une main paternelle, aussi forte que douce,
Dieu nous guide et soutient, de secousse en secousse !

 Dieu seul est grand, seul bon, seul juste et tout-puissant ;
L’homme s’agite, et Dieu le mène en l’aveuglant !…
Pour ton bonheur futur et ta gloire, ô patrie,
Malgré le sombre orage, oui, j’espère et je prie !
Ce qui t’agite ainsi, ce qui fermente en toi,
C’est un espoir sublime, une héroïque foi !
Par toi s’accompliront les plus grandes conquêtes ;
Tu dois réaliser l’idéal des poètes ;
Oui, l’espoir de l’Église et de l’humanité
Repose en ton ardeur et ta virilité !
Malgré tes ennemis, et les guerres civiles,
Et les rugissements des populaces viles,
Et tout ce qu’en son cœur l’Hérésie a de fiel, —
Ta Patronne sur toi veille du haut du ciel ;
Sur toi veille Marie, Ô jeune République ;
Et ton sein, fécondé par l’amour catholique,
Produira des guerriers, des héros et des sainte,
L’élite des Croyants et des Républicains !
 Pour former sous ses yeux un Clergé digne d’elle,
Rome t’ouvre un Colège, et t’invite et t’appelle…
Réveille-toi, ma mère ; Amérique, il est temps ;
De tes plus saints foyers détache tes enfants ;
Qu’ils aillent s’abreuver à la source première,
Au Centre rayonnant d’amour et de lumière !
Oui, laisse-les partir, pour qu’avec plus d’éclat
Brillent ton Sacerdoce et ton Épiscopat ;
Pour que plus d’unité, de zèle apostolique,
Plus de ferveur céleste et d’amour ascétique,
Plus d’esprit de prière et de recueillement,
Au Dieu Crucifié t’attache fortement !
Pour qu’au milieu du bruit de l’Industrie active,
Tu puisses tolérer l’âme contemplative ;
Et qu’en ta fougue aveugle et tes bruyants progrès,
Tu laisses au désert vivre et prier en paix
Ces hommes inspirés qui, pareils à Moïse,
Pour servir la Patrie et pour servir l’Église,
Pour leurs frères aimés, inquiets combattants,
Offrent et leur prière et leurs pleurs pénitents !
Car, malgré la distance, et le temps, et l’espace,
Par un mystique aimant tout se lie et s’enlace ;
La prière enflammée, en s’élançant vers Dieu,
Ébranle dans son vol tous les globes de feu !
Chaque âme en oraison conduit un char d’Élie ;
Le ciel s’ouvre à la voix de celui qui supplie ;
Et chaque pleur d’amour, versé pour le pécheur,
Des foudres de justice éteint le feu vengeur !